lin-terre-de-lin-made-in-france-agricultrice-lin-myras-miras

En juin dernier, nous sommes allées rencontrer des productrices de lin, au sein de la coopérative Terre de Lin. Nous avons pu rencontrer Anne, 56 ans, agricultrice sur une petite commune qui s'appelle Saint-Sylvain, près de Saint-Valery-en-Caux, sur la côte d'Albâtre en Normandie. Durant cet entretien, Anne nous livre comment elle a choisi ce métier, sa passion pour le lin et les défis qu'elle rencontre au quotidien en tant qu'agricultrice.

 

Depuis quand exercez-vous ce métier et comment l’avez-vous choisi ?

C'est un métier que mes parents exerçaient, donc je suis née dans une exploitation agricole. Papa, maman travaillaient, ils produisaient du lin et tous les ans, surtout au moment de la moisson et de la récolte du lin, je participais à ces travaux. A l'époque, la modernisation n'était pas aussi importante donc les bras étaient nécessaires. Le lin était récolté sous forme de petites bottes, donc moi et mon frère on n'avait pas le choix, il fallait participer aux travaux de la moisson.

Plus tard, j'ai dû choisir un métier, j'ai hésité longtemps à faire des études agricoles ou de comptabilité. Je suis partie vers la comptabilité qui me plaît et naturellement, j'ai rencontré un agriculteur, je me suis mariée et j'ai continué de participer aux travaux de la ferme. Aujourd'hui, je suis installée avec mon mari et j'ai ma place sur l'exploitation.

Qu’est-ce qui vous passionne dans votre métier ? Qu’est-ce que vous aimez le plus ?

Ce qui me passionne, on travaille avec du vivant, c'est jamais pareil. On vit de notre métier on produit pour nourrir, on produit pour habiller. Les saisons passent et ne se ressemblent pas, ce métier, finalement on connaît que ça.

On travaille du semi à la récolte en famille, je vous avais dit que j'étais fille d'agriculteur et maintenant je suis femme d'agriculteur et maman d'agriculteur. C'est une exploitation familiale et on a plaisir à travailler en famille. On est tous passionnés par ce métier.

Quels sont les défis que vous rencontrez au quotidien ?

Les plantes c'est du vivant donc on vit forcément avec la météo, c'est très important. Il y a des années où tout roule et des années où c'est moins facile. Finalement, le seul point que l'on ne maîtrise pas, c'est la météo.

Pas plus tard que dimanche, on attendait désespérément la pluie depuis des semaines, voire des mois. Puis dimanche, on était très heureux parce qu'il s'est mis à pleuvoir. Sauf que la pluie ne s'est pas arrêtée, il a plu énormément dans notre région. On était absent ce jour-là et quand on est rentrés on a dû faire demi-tour car on a vu une rivière sur la route. En rentrant on avait qu'une hâte, c'était d'enfiler nos bottes et aller voir nos parcelles de lin, voir si le lin était toujours debout ou s’il était versé. On était contents car il était debout finalement.

Le lin c'est une culture très courte dans sa durée d'implantation, en moyenne c'est 120 jours entre le semi et l'arrachage. C'est une culture fragile.

Est-ce que vous rencontrez des défis en tant que femme dans ce métier ?

Les femmes en agriculture, moi je dirais qu'elles ont toujours été présentes. Maman, mes tantes, ont travaillé autant sur l'exploitation que leurs maris. A l'époque, elles n'avaient pas de statut. Aujourd'hui, les femmes sont toujours présentes, des jeunes femmes s'installent en tant qu'agricultrices et ça, c'est fou ! Et parfois, elles s'installent même sans que leur conjoint soit du milieu agricole : je peux leur sortir mon chapeau !

Moi j'ai la chance d'avoir une famille qui m'entoure, j'ai ma place sur l'exploitation familiale, mais c'est sûr qu'en tant que femme, pour ma part en tout cas, c'est dur, mais je réussis à trouver mon équilibre.

Quels conseils / motivations donneriez-vous à des personnes intéressées par ce métier ?

Le métier d'agricultrice, je pense qu'il a de l'avenir. Par contre, un point clé, il faut être passionnée. Sans la passion, j'ai du mal à croire que l'on puisse vivre de ce métier : il ne faut pas compter ses heures, il faut être présent à tout moment, à tout stade de l'agriculture, pour surveiller les maladies, pour surveiller les insectes, pour tout surveiller. Les récoltes, il ne faut pas se précipiter, il faut être présent, il faut être patient.
Parfois c'est pas évident de dire “Est-ce que c'est bon ? Est-ce qu’on peut rentrer notre lin ? Il est assez roui ?” et puis il faut prendre la décision.

Pensez-vous que c’est important de présenter les métiers du lin au grand public ?

Oui, car le grand public ne connaît pas le lin. Pour preuve, depuis plus de 30 ans tout près d'ici, début juillet, un weekend par an est organisé le Festival du Lin. On fait des visites organisées durant tout ce weekend, nous les agriculteurs du teillage et on est surpris du nombre de personnes qui viennent. C'est fou, j'y croyais pas !
Les gens sont intéressés, voient la chaîne de teillage, ne s'imaginent pas qu'on passe de la filasse au produit fini, puis après le peignage, au ruban soyeux qui en sort. C'est une découverte pour les gens et ils sont heureux d'avoir visité notre teillage.

Quel avenir pour la culture du lin selon vous ?

Je ne vous ai pas parlé de tout ce qui est environnement. En fait, cette culture demande très peu d’intrants, même pas du tout. On ne met pas d'intrants dans les années optimum, quand la météo est avec nous. Quand la météo n'est pas forcément avec nous, cette plante vit et elle peut avoir des maladies. Du coup, j'ai envie de dire, quand elle est malade, on la soigne et on est obligés d'avoir recours si besoin à nos produits phytosanitaires. Mais, on reste quand même dans une agriculture raisonnée, on fait attention à ce que l'on met et on regarde comment vit la plante. On le voit si elle est atteinte de maladies ou d'insectes. Depuis peu c'est vrai qu’au sein de Terre de Lin, il y a un pôle de recherche très important. Nous ayant notre âge, on a vu que la qualité de nos semences s'est considérablement améliorée, elles sont moins malades à certaines maladies comme l'oïdium et plus résistantes à d'autres critères comme l'averse.

Enfin depuis peu de temps, c'est incroyable, car nos semences étaient jusqu'alors traitées avec des produits et depuis plusieurs années, notre coopérative a trouvé un procédé pour ne plus utiliser de produits phytosanitaires. Et ça marche, la plante vit bien !

Le mot de la fin : 
Aujourd'hui en tant que femme, j'aime bien porter du lin et je vois bien que dans toutes les boutiques, on met en avant de beaux vêtements en lin et je n’en reviens pas moi-même !

 


Laissez un commentaire

×